Objectif 2 :
Accompagner et reloger les occupant·es
2.A. Le cadre général
– Obligations du bailleur :
CCH : L.521-1 : “Le propriétaire ou l’exploitant est tenu d’assurer le relogement ou l’hébergement des occupants ou de contribuer au coût correspondant dans les conditions prévues à l’article L.521-3-1”. Suspension des loyers : CCH : L.521-2
Peines encourues : CCH : L.521-4
– Obligation de la collectivité :
CCH : L.521-3-2 : « I . – Lorsqu’un arrêté de péril pris en application de l’article L.511-1 ou des prescriptions édictées en application de l’article L.123-3 ou de l’article L.129-3 sont accompagnés d’une interdiction temporaire ou définitive d’habiter et que le propriétaire ou l’exploitant n’a pas assuré l’hébergement ou le relogement des occupants, le maire prend les dispositions nécessaires pour les héberger ou les reloger.
II. – Lorsqu’une déclaration d’insalubrité, une mise en demeure ou une injonction prise sur le fondement des articles L.1331-22, L.1331-23, L.1331-24, L.1331-25, L.1331-26-1 et L.1331-28 du code de la santé publique est assortie d’une interdiction temporaire ou définitive d’habiter et que le propriétaire ou l’exploitant n’a pas assuré l’hébergement ou le relogement des occupants, le préfet, ou le maire s’il est délégataire de tout ou partie des réservations de logements en application de l’article L.441-1, prend les dispositions nécessaires pour héberger ou reloger les occupants, sous réserve des dispositions du III.
III. – Lorsque la déclaration d’insalubrité vise un immeuble situé dans une opération programmée d’amélioration de l’habitat prévue par l’article L.303-1 ou dans une opération d’aménagement au sens de l’article L.300-1 du code de l’urbanisme et que le propriétaire ou l’exploitant n’a pas assuré l’hébergement ou le relogement des occupants, la personne publique qui a pris l’initiative de l’opération prend les dispositions nécessaires à l’hébergement ou au relogement des occupants ….
V. – Si la commune assure, de façon occasionnelle ou en application d’une convention passée avec l’Etat, les obligations d’hébergement ou de relogement qui sont faites à celui-ci en cas de défaillance du propriétaire, elle est subrogée dans les droits de l’Etat pour le recouvrement de sa créance.
VI. – La créance résultant de la substitution de la collectivité publique aux propriétaires ou exploitants qui ne se conforment pas aux obligations d’hébergement et de relogement qui leur sont faites par le présent article est recouvrée soit comme en matière de contributions directes par la personne publique créancière, soit par l’émission par le maire ou le préfet d’un titre exécutoire au profit de l’organisme ayant assuré l’hébergement ou le relogement….»
– Obligation de relogement par l’autorité publique :
Sur fondement du DALO (CAA Paris : 20.9.12) et au titre de l’habitat indigne (TA Melun : 30.5.12), l’autorité publique (préfecture) est tenue par la jurisprudence d’assurer le relogement en cas de défaillance du bailleur afin de protéger les occupants d’une possible dégradation de leur état de santé. Au vu de la situation d’aggravation de l’état psychologique et sanitaire des délogé.es identifiée par les psychologues mobilisé.es ainsi que par les associations et collectifs, la présente charte a pour objet d’anticiper une telle situation.
Cf. code de l’action sociale et des familles : accès inconditionnel à l’hébergement d’urgence (article L345-2-2) et maintien en hébergement stable jusqu’à orientation vers un logement adapté (L345-2-3)
2.B. L’accompagnement tout au long du processus de relogement
La collectivité s’engage à centraliser et fournir toutes les informations utiles aux délogés au sein du guichet unique, leur permettant de suivre l’évolution de leur situation. Un référent unique par foyer doit être désigné. Les personnes évacuées ont droit, sur simple demande, d’être accompagnées dans leurs démarches par une personne de leur choix et ont accès à tout moment à une information complète et transparente.
a. Mettre en place des dispositifs adaptés et exceptionnels
Pendant toute la durée de l’accompagnement, l’ensemble des personnes délogées ont droit à la gratuité des services municipaux (crèches, cantines…), à des tickets repas/service à la hauteur des besoins quotidiens et continuité de l’accès à la cantine de la cité des associations, accès à des services de blanchisserie gratuits sur simple demande, aide sociale forfaitaire selon les cas après étude des situations.
b. Accompagnement social ou sanitaire spécifique
Continuité du parcours médical assurée, identification des besoins et suivi au sein des hôtels par l’opérateur social missionné. L’identification de situations de handicap ou conditions sanitaires particulières entraînant la mise en place de dispositifs adaptés.
c. Accompagnement psychologique et scolaire
Consultation psychologique gratuite . identification auprès de l’éducation nationale des situations de décrochage et de déscolarisation des enfants délogés. Identification des problématiques et accompagnement ad hoc. Mise en place de dispositifs adaptés aux situations à proximité des lieux d’hébergement ou de relogement temporaire, en s’appuyant sur le réseau des centres sociaux et MPT (Maisons Pour Tous).
Prise en charge gratuite de l’accueil des enfants de délogé.es dans les structures de loisir pendant les vacances scolaires et mercredi
2.C. Les quatre temps (T) du relogement
Principes initiaux :
- Hébergement décent correspondant aux besoins (CCH : L.521-3-1)
- Hébergement en hôtel classé économique ne peut être que provisoire (CA Paris : 5.11.03)
2.C.1. Temps 1 : Le relogement d’urgence en hôtels et appart-hôtels
a. Condition et durée de la prise en charge
L’ensemble des délogé.es auront accès à l’hébergement d’urgence jusqu’au relogement sans conditions de statut d’occupation ni de statut administratif, aux frais avancés de la collectivité.
Prise en charge, sans limite, des nuitées pour l’ensemble des évacués. Maintien dans le même hébergement tout au long de la prise en charge par anticipation du renouvellement des nuitées, sauf demande contraire du foyer.
Dans la mesure du possible le séjour en hébergement ne devra pas dépasser 1 mois. Priorisation pour les sorties d’hébergements aux familles nombreuses avec enfants, et aux personnes ayant des problèmes sanitaires ou sociaux.
Une attestation d’hébergement sera remise à tout délogé sur simple demande.
b. Accompagnement dans les hébergements
Mise en place d’un accompagnement social dans les lieux d’hébergement : identification des problématiques et visites régulières aux hôtels, vérification des services fournies, accompagnement social, administratif et psychologique pour les personnes limitées dans leurs déplacements. Distribution de repas chauds aux hôtels et petit-déjeuner servis dans les salles communes.
Transfert le plus tôt possible dans un hébergement stable adapté à la composition familiale facilitant l’autonomie (présence de cuisine, adaptabilité handicapé…) : appart-hôtel, résidence sociale, pension de famille, etc. Même dispositif. Tickets services remplacent la distribution de repas chauds.
2.C.2. : Temps 2 : le relogement provisoire
a. Proposition de relogement et notion de « logement adapté »
- Nombre de propositions de relogement provisoire sans limite.
- Localisation à proximité du lieu originel d’habitation, de l’établissement scolaire et des réseaux
de transport pour se rendre sur le lieu de travail.
- Typologie équivalente ET adaptée à la composition du foyer.
- Veiller à ne pas accentuer l’éloignement des parents pour les enfants en garde alternées.
- Proximité déplacements pendulaires (enfants , travailleurs , aidants familiaux, personnes
âgées et à mobilité réduite , assurer la continuité des parcours de santé.
- Accompagnement par l’opérateur social missionné et possibilité d’être accompagné par une
personne de son choix.
- Portage financier du titre d’occupation : loyer et charges à la charge du propriétaire ou des pouvoirs publics (CA Douai : 17.3.05 et CA Versailles : 13.9.05). Le délogé bénéficiera d’un contrat lui garantissant le maintien jusqu’au relogement et l’accès au droit.
b. Aide au relogement
Accompagnement pour l’ameublement, inscription scolaire, suivi de courrier, démarches administratives, médicales.
Principe de non-charge supplémentaire : accès au relogement provisoire pour les propriétaires occupant.es à leurs frais à condition d’une suspension des crédits négociée par l’Etat ou d’une prise en charge par les assurances/un fonds d’aide spécial de l’Etat. Sinon, prise en charge du relogement provisoire par les pouvoirs publics.
L’Aide Métropolitaine Exceptionnelle est rendue accessible sans distinction aucune à l’ensemble des délogés.
2.C.3. Temps 3-1 : La réintégration dans le logement initial
cf. 1.C.5
2.C.4. Temps 3-2 : Le relogement à durée indéterminée dans un nouveau logement
a. Notion de « logement adapté »
Principe jurisprudentiel : le logement doit être adapté “aux besoins et possibilités” (TI Douai : 8.3.06). Déclinaison de ce principe acté en réunion Mairie/collectifs-associations :
- typologie a minima équivalente au logement originel et adaptée à la composition du foyer.
- reste à charge au m2 inférieur ou équivalent.
- propositions illimitées.
- propositions faites dans l’arrondissement d’origine ou limitrophe.
- motivation par écrit adressé aux ménages en cas de refus du bailleur.
- le temps de trajet porte à porte entre le logement et le lieu de scolarisation/de travail ne doit
pas être rallongé de plus de 15 minutes.
- logement adapté aux besoins spécifiques (situation sanitaire, isolement des personnes etc.).
- proximité avec les aidants familiaux, dispositifs médicaux etc.
Dans le cadre des attributions, le taux d’effort net ( Loyers+charges-Allocations Logement/ Revenus net ) sera pris en compte et non celui du reste à vivre.
d. Dépôt de garantie
Afin de permettre l’accès au parc privé, l’Etat étend le dispositif VISALE afin de se porter garant pour les locataires et supporter la charge financière du dépôt de garantie.
e. Priorité des relogements
Les personnes délogées sont prioritaires selon deux principes :
situation sociale de précarité, sanitaire particulière et familles nombreuses
date de l’évacuation
2.C.5. Temps 4 : Le droit inconditionnel au retour
a. Principe
Les personnes délogées doivent pouvoir retourner dans leurs logements (CA Paris : 5.11.03) ou quartiers d’origine selon leur volonté.
b. Non-suspension du bail
Les occupants sont informés que leur évacuation et leur prise en charge ne nécessite pas de suspendre leurs baux. Ils pourront réintégrer leurs logements d’origine après les travaux si cela est souhaité. Dans le cas contraire, prise en charge du relogement par l’opérateur social missionné.
En cas de signature d’un nouveau bail, le droit au retour reste garantie : l’hébergement incombe au bailleur en cas d’interdiction temporaire d’habiter en l’absence de renonciation expresse des locataires à ce droit, nonobstant le fait qu’ils aient signé un autre contrat de bail (Cass. civ III : 3.2.10).
c. En cas de rachat des immeubles par la puissance publique
Si conversion du logement d’origine en logement social ou revente à des opérateurs privés, les anciens occupants seront prioritaires de fait quelque soit la durée de remise sur le marché du logement, avec reste à charge constant ou inférieur. La collectivité signataire de la présente charte s’engage à imposer aux bailleurs publics et privés le respect de ce droit au retour dans un principe d’équivalence (même niveau de loyers et typologie de logement adapté).
2.C.6 Mobilisation du parc privé et social dans le cadre des hébergements et relogements
2.C.6.1 Mobilisation du parc privé
Mise en place d’une stratégie pour mobiliser le parc privé :
1. Mobilisation du parc de logements vacants (fichiers des taxes d’habitation, identification grâce à la nomination d’agents assermentés – Loi du 29 juillet 1998, art. 52, contacts avec agences immobilières, contrôle du parc de logements de location saisonnière)
2. Développement de l’offre d’intermédiation locative
3. Bail à réhabilitation et mise en location de logements conventionnés via les aides ANAH propriétaires bailleurs
4. Mobilisation de parc de logement privé conventionné
5. Réquisition : Application de la loi de réquisition (ordonnance de 1945 CCH : L641-1 et Loi du 29 juillet 1998) qui concernera des logements en diffus comme des biens immobiliers appartenant à des grandes institutions publiques et privées dont des bureaux. Dans ce sens, la collectivité s’engage à dresser et communiquer publiquement une liste de biens vacants.
Dispositif d’accompagnements des délogés
Obligation du bailleur en cas d’impossibilité de réintégration et nécessité de relogement définitif : indemnisation à hauteur de 3 mois du nouveau loyer. (CCH : L.521-3-1 II)
Aide métropolitaine exceptionnelle pour l’ensemble des délogé.es, sans condition de situation pour couvrir les frais d’emménagement, d’ameublement et le dépôt de garantie.
Mise en place d’un dispositif d’aide permettant de couvrir le reste à charge au m2 supplémentaire si nécessaire (exemple ajout aux APL sans mosdification du coefficient familiale qui risquerait de réduire l’accès à d’autres aides du type prise en charge de la cantine scolaire)
Contrôle de la décence du logement avant intégration.
Accompagnement par l’opérateur social missionné pour l’ensemble des démarches administratives.
Mobilisation du parc social
L’ensemble des contingents réservataires sera mobilisé , pour reloger les délogés : Etat, , Action logements, Région, Département, Métropole, Ville et bailleurs sociaux, dans le cadre du respect de leur obligation de consacrer 25% de leurs attributions aux publics prioritaires (loi égalité- citoyenneté)
Accès au parc social sans condition de situation = portage du bail par un opérateur associatif si nécessaire pour les publics n’ayant pas normalement droit au logement social
Principe du rééquilibrage 1 pour 1 : 1 logement social mobilisé = programmation de la création d’un nouveau logement social dans le cadre du plan pour l’habitat de la Métropole ou des autres collectivités.
2.D. Engagement de protection des occupants pour les cas dits “spécifiques”
a. Propriétaires occupants
Mise en place d’une stratégie de protection des propriétaires occupant.e.s (PO) :
- assistance juridique
- facilitation et accélération des aides à la rénovation et pour les travaux d’urgence
- négociation d’une suspension des crédits et d’une prise en charge par les assurances
- constitution d’un fonds d’aide spéciale d’Etat pour couvrir les frais de relogement des PO et
faire appliquer le principe de non-charge supplémentaire en cas d’impossibilité de négociation avec les banques et assurances (ne pas devoir payer un loyer en plus d’un crédit)
b. Occupants de bonne foi et étrangers en situation irrégulière
Les occupants, avec bail ou de bonne foi, en situation régulière ou irrégulière sont pris en charge au même titre que les autres occupants. L’accès à l’hébergement en hôtel défini dans cette charte leur est dû. La loi ne fait pas de distinction de statut administratif ou d’occupation. cf. Cour d’appel de Paris (CA : 16.12.10), TGI (TGI : 26.5.08) et cour de cassation (Cass. civ. III : 12.9.12)
Une étude des dossiers de régularisation à titre humanitaire et discrétionnaire est mise en place avec un accompagnement spécifique par les associations spécialisées.
CCH, L.521-1 : «Pour l’application du présent chapitre, l’occupant est le titulaire d’un droit réel conférant l’usage, le locataire, le sous-locataire ou l’occupant de bonne foi des locaux à usage d’habitation et de locaux d’hébergement constituant son habitation principale…».
c. Décohabitation
Si un projet de décohabitation (séparation, enfant majeur, fin de colocation…) était en cours au moment de l’évacuation, les demandeurs peuvent être accompagnés dans les conditions prévues par la présente charte, comme cela a déjà été organisé par l’opérateur social missionné.